Volume :
65
Gérard Szwec
Code ISBN :
978-2130861423
Nombre de pages :
184
Date de parution :
04 avril 2024
04 avril 2024
11 novembre 2023
Avant-propos de Dominique Cupa
La question des traces traverse l’ensemble de l’œuvre de Freud. Elle compose dès le début un des soubassements fondamentaux de la théorie freudienne avec la constitution des différents types de représentations provenant des « traces mnésiques », elles-mêmes issues des perceptions. Elles permettent la mise en place de la mémoire tramée par ces représentations dans des jeux d’après-coup qui ouvrent sur la méthode liée aux traces et au retour des souvenirs refoulés. Freud s’attarde surtout sur les traces mnésiques, y compris les traces mnésiques phylogénétiques. Son élaboration est d’abord intimement liée au traitement des névroses. À partir des années 1920, il prend en compte les expériences traumatiques et leur surcharge d’excitations se déployant de façon effractive ; il développe les effets de l’économique sur l’affect (l’effroi), la sidération psychique d’un moi envahi par les perceptions traumatiques et la désarticulation des traces mnésiques. Les expériences impliquées ne sont plus construites sous forme de souvenirs, elles sont soumises à la contrainte de répétition. La contrainte à répéter n’est-elle pas, aussi, alors une contrainte à intégrer ? Quelle méthode alors le psychanalyste doit-il employer ?
La question des traces s’avère d’une grande complexité dans le corpus théorique de Freud, et depuis ses propositions elle a ouvert sur de nombreuses interrogations et hypothèses, ce que montrent les différents apports de cette Revue. Après avoir repris la question des traces dans la pensée de Freud, je propose une compréhension des traces mnésiques selon Pierre Marty partant de sa théorisation des fixations/régressions pour finir sur la place de l’objet dans la constitution des traces. Les questions et les propositions personnelles des auteurs ayant contribué à l’élaboration de cette Revue française de psychosomatique 64 nourrissent ma réflexion et proposent des ouvertures, ils composent la structure de la Revue et celle de mon texte.
Dans « Projet d’une psychologie », Freud signale rapidement que « toute théorie psychologique digne d’intérêt se doit de fournir nécessairement “une explication de la mémoire” » (1895/2006, p. 607). Mais il se heurte à une difficulté pour imaginer « un appareil » qui rende à la fois compte d’une « capacité de retenir tout en étant réceptive ». Il doit concevoir un appareil qui reste disponible tout en conservant des traces. En 1925, dans « Note sur le Bloc magique », il se trouve dans la même perspective et écrit : « Les appareils auxiliaires que nous avons inventés pour l’amélioration ou le renforcement de nos fonctions sensorielles sont tous édifiés comme l’organe sensoriel lui-même ou des parties de celui-ci (lunettes, appareil photographique, cornet acoustique, etc.) Mesurés à cette aune, les dispositifs auxiliaires semblent particulièrement défectueux au regard de notre mémoire, car notre appareil animique opère justement ce que ceux-ci ne peuvent pas opérer ; il est de façon illimitée capable de réception pour des perceptions toujours nouvelles et il en produit pourtant des traces mnésiques durables, quoique non inaltérables [1]» (Freud, 1925/1992, p. 140). Cependant, c’est dans ce texte que Freud propose un appareil explicatif : l’ardoise magique, et rend compte de sa théorie la plus finie du dispositif mémoriel.
4Pour répondre à ses questions, Freud distingue plusieurs catégories de substrats, les neurones, dont les uns se transforment pour constituer les enregistrements mnésiques, tandis que les autres restent inchangés et demeurent vierges pour assurer la réceptivité permanente. Il envisage également des types différents de fonctionnements qui correspondent à des modes de frayages différents, ce qui le conduit à distinguer une fonction primaire et une fonction secondaire. La mémoire se trouve alors « représentée par les différences de frayage existant entre les neurones ». Freud va abandonner l’idée des neurones substrats, mais conserve différents lieux psychiques et les deux types de fonctionnements psychiques.
5Dans sa « Lettre du 6 décembre 1896 » à Fliess (1896/2006, p. 264) il apparaît clairement que pour lui notre appareil psychique se constitue à travers l’engrammation de traces mnésiques. Mais surtout, il avance que les traces mnésiques peuvent subir des transformations : remise en ordre et réécriture, et qu’il y a plusieurs strates de mémoire chacune comportant des « signes » différents. La mémoire, et ses différentes sortes de traces, devient un appareil d’écriture et de traduction. C’est dans ce texte qu’il propose une première et éclairante topologie des traces qu’il reprend par la suite dans L’Interprétation des rêves, « Au-delà du principe de plaisir » et « Note sur le “Bloc magique” ».
Dans cette lettre, Freud considère quatre niveaux, dont trois niveaux d’inscriptions.
Premièrement : il n’y a pas d’inscription de la perception apparaissant à la conscience, car celle-ci exclut tout phénomène mnésique.
8Deuxièmement : le signe de perception (ou perception-signe selon A. Berman et C et S. Botella) constitue la première inscription, elle est « disposée selon des associations par simultanéité » (ibid., p. 264), donc tramée synchroniquement et elle « est tout à fait incapable de conscience ».
9Troisièmement : les « souvenirs conceptuels » constituent le second type d’inscriptions (ou une seconde transcription) et sont liés peut-être par des rapports de causalité. Ils appartiennent au système inconscient et sont inaccessibles à la conscience. Ils constituent les représentations de chose par la retranscription diachronique qu’ils mettent en œuvre.
10Quatrièmement : au niveau préconscient s’opère une dernière traduction par l’intermédiaire des représentations de mots qui fournissent la possibilité d’une prise de conscience après-coup.
11L’appareil de mémoire est une sorte de machine à traduire qui peut d’ailleurs dysfonctionner. Freud avance dans cette lettre que certains matériaux ne sont pas traduits. « Le refusement de la traduction, voilà ce qui dans la clinique s’appelle refoulement. Le motif en est toujours la déliaison de déplaisir que la traduction ferait naître […] » (ibid., p. 265). Il explique plus loin qu’« un plaisir inhibé constitue une contrainte » (ibid., p. 266). Il se pose alors la question « du fondement organique » de ces expériences vécues sexuelles. « La déliaison de plaisir » ou « de déplaisir » s’obtiendrait, à partir de très nombreux lieux du corps [2]», écrit-il (ibid., p. 270) soit les zones érogènes. Les traces ont donc une dimension organique et corporelle, le corporel relevant de l’investissement en termes de plaisir et de déplaisir du corps.
12Notons que l’économique a sa place. Chaque traduction ultérieure inhibe la précédente et en draine l’excitation. Lorsqu’il manque une transcription, l’excitation est liquidée selon les modalités précédentes, il “subsiste un anachronisme dans une certaine province des “fueros” sont en vigueur ; il se produit des survivances » (ibid., p. 264).
13Dans son article, Claude Smadja montre toute l’importance du concept d’après-coup qui repose sur la notion de remaniement permanent des traces mnésiques et de leur valeur traumatique. Selon l’auteur, le modèle traductif relie conceptuellement les après-coups successifs à de nouvelles retranscriptions du matériau psychique. Suivant Freud au plus près, il évoque la conjoncture psychique dans laquelle les mécanismes de traduction sont manquants. Il considère que le modèle traductif freudien a une parenté avec le modèle de la désorganisation progressive développée par Pierre Marty. Il précise que le premier élément commun entre ces deux modèles est la prééminence du principe économique énoncé par Freud avec la tendance à l’équilibrage quantitatif des processus de traduction qu’on retrouve chez Marty et les fondateurs de l’École de Paris avec la notion de « principe d’équivalence énergétique » au fondement de tous les processus psychosomatiques.
14Dans L’interprétation du rêve (1900/ 2003, p. 243), Freud indique à nouveau que le lien de causalité qui ouvre sur une nouvelle traduction est un lien d’après-coup : l’étiologie sexuelle des psychonévroses est déterminée par l’action sur les expériences sexuelles infantiles en après coup. Il apparaît, d’ailleurs, nettement que les traces sont les restes « d’impressions » externes et internes dont la valence est éminemment sexuelle. L’après-coup éclaire le mode d’inscription dans la psyché et ce qui fait sens dans son travail de réécriture. Freud précise que la perception (Pc) qui ne peut pas garder les modifications n’a pas de mémoire mais par contre « délivre à notre conscience toute la variété des qualités sensorielles » (Freud, 1900/2004, p. 592). Il me semble intéressant aussi de remarquer, comme le propose César Botella (2016, p. 186), que la plus grande partie du schéma que Freud propose alors se distingue par une série S, S”… « au plus près de l’extrême de la perception ». Cet espace important figurerait le champ des signes de perceptions, champ de la mémoire inaccessible à la conscience, repris entre autres, dans « L’homme Moïse et la religion monothéiste » dans lequel Freud décrit des réactions aux traumatismes à effet négatif qui se manifestent par des comportements n’étant pas repris psychiquement, « des traumas dont rien ne doit être remémoré et rien répété » (Freud, 1938/2010, p. 155). César Botella avance que ces signes de perceptions se caractérisent par une puissante tendance à la décharge sous des formes perceptives, hallucinatoires, motrices, voire corporelles lors des désorganisations somatiques. Guy Rosolato (1985) comprend, pour sa part, les signes de perception comme étant des signifiants de démarcation et insiste sur la façon dont ces signifiants « imprègnent » le fonctionnement psychique. Ils constituent la mise en mémoire d’impressions, de sensations, voire d’épreuves sans pour autant avoir été mis en mots.
15Le travail psychanalytique de Nathalie Thessier avec une adolescente rescapée d’un avortement est un exemple très intéressant sur la façon dont au cours de la psychothérapie le repérage des traces perceptives s’avère complexe du fait de l’enchevêtrement de processus primaires en rapport avec un retour d’un clivé archaïque et les processus secondaires mais aussi d’une symptomatologie qui se manifeste sur le plan psychique avec des hallucinations, sur le plan somatique avec de l’asthme, une myocardite, et des comportements automutilatoires. L’enjeu de la psychothérapie est alors de tenter de traduire les perceptions afin qu’elles ne restent pas « actuelles », qu’elles sortent de leur « opacité » comme pourrait l’avancer Sara Botella (2016, p. 23). Elle précise pour sa part que lorsque la traduction du matériel perceptif n’a pas eu lieu, il subsiste une opacité qui « constitue un anachronisme dans l’équilibrage quantitatif global dans le drainage des processus d’excitation » et peut donc « se comporter comme quelque chose d’actuel » (idem).
16Ce faisant, comme le propose Lina Balestrière (2008, p. 67), le signe de perception ne serait-il pas « le signe du sentir, la trace immémorielle d’un rythme, cicatrice ombilicale que tout être humain doit à la fonction maternelle » ? J’y reviens plus loin dans la dernière partie de mon propos.
17Freud donne des précisions importantes dans « L’inconscient » (1915/1988). Il note que les représentations de chose « consistent en l’investissement, sinon des images mnésiques directes de la chose, du moins en traces mnésiques plus éloignées et dérivées d’elle » (ibid., p. 240). Le décalage entre la trace et la représentation vient de l’investissement, de la charge pulsionnelle liée à la représentation de chose. La représentation de chose signe la dynamique pulsionnelle à la recherche de ses représentations-but, c’est-à-dire des représentations qui peuvent conduire à la satisfaction libidinale. Elle appartient au « système inconscient [qui] contient les investissements de chose des objets, les premiers et véritables investissements d’objets.
18Dès le début de son écrit sur « Le refoulement » (1915/1988), Freud avance d’une part qu’avant celui-ci, existe une organisation psychique qui a pour tâche la maîtrise des motions pulsionnelles : la transformation en son contraire et le retournement sur la personne propre qu’André Green va théoriser comme « double-retournement » ; d’autre part, concernant le refoulement originaire, il écrit « une première phase du refoulement, qui consiste en ceci que la prise en charge dans le conscient est refusée à la représentation psychique (représentance de représentation) de la pulsion. Celle-ci s’accompagne d’une fixation [3][3]C’est moi qui souligne. ; la représentance concernée subsiste, à partir de là, sans modification possible et la pulsion demeure liée à lui » (ibid., p. 191). Dans leur Vocabulaire, Laplanche et Pontalis proposent une interprétation intéressante de la fixation : celle-ci tient certes à la conception génétique de Freud : fixation de la pulsion à un stade ou un objet, mais surtout, ils avancent l’idée qu’il s’agit d’une inscription dans l’inconscient de traces dans les différents systèmes mnésiques (1967/1973, p. 163 et p. 414). La notion de fixation déjà présente dans « La lettre du 6-12-1886 » insiste sur l’idée d’une fixation non seulement de la trace mais aussi de l’excitation.
19En 1924 sort dans le commerce un petit instrument qui permet à Freud de formaliser de la façon la plus complète sa théorie de la mémoire. Le bloc-notes magique lui permet de résoudre la question d’un même appareil permettant le maintien et l’effacement de la trace. Il reprend les instances de la première topique. Le système Cs-Pcs est composé d’un double feuillet ; un feuillet superficiel représenté par la pellicule de celluloïd et qui figure le « pare-stimulus », le feuillet du dessous en papier ciré est l’espace de réception et d’enregistrement des traces sur la tablette de cire. La partie consciente perçoit, mais ne conserve pas et la partie préconsciente, la mémoire enregistre et conserve les « impressions ». L’inconscient pour sa part tend « en direction du monde extérieur des antennes qui, après qu’elles en ont dégusté les excitations, sont rapidement retirées ». En d’autres termes, le système pulsionnel, à la différence de ce que Freud propose en 1915 (Pulsion et destin des pulsions), ne fonctionne pas comme « une force « constante » (p. 143) mais investit de façon « périodique » le système Cs-Pcs et lui donne alors « une représentation primaire du temps ». On perçoit bien ici l’interaction entre le milieu externe et ses divers stimuli et les mouvements pulsionnels.
Pierre Marty emboîte le pas de Freud en proposant sa propre élaboration au sujet des traces, en précise certains contours, en particulier affirme leur aspect phylogénétique. Dans son article pour ce numéro, Gilbert Diatkine suivant Freud, de Totem et tabou jusqu’à Moïse et le monothéisme, pose la question : comment les traces des événements vécus par les générations précédentes s’inscrivent-elles dans notre inconscient ? sont-elles phylogénétiques ? préhistoriques ? historiques ? sont-elles mnésiques, c’est-à-dire mémorables ?
C’est lorsqu’il décrit la fonction maternelle chez la mère et chez le thérapeute dans L’ordre psychosomatique que Marty écrit : « Les acquis du nourrisson se résument au départ dans les traces mnésiques inconscientes (les fixations) phylogénétiques et héréditaires » (1980, p. 122-123). Il précise, dans la suite de ce chapitre, combien est important le rôle de la fonction maternelle dans la constitution des fixations. Mais avant d’aborder la question de la formation des fixations, il me semble important de revenir sur celles des traces phylogénétiques telles que Marty les conçoit. Il avance qu’elles constituent « le noyau de l’inconscient », significatif d’un patrimoine phylogénétique inconscient aux contenus germinatifs et organisateurs » (ibid., p. 103) en s’appuyant entre autres sur la proposition que fait Freud à la fin du chapitre sur « L’inconscient » : « S’il existe chez l’être humain des formations psychiques héritées, quelque chose d’analogue à l’instinct des animaux ; c’est là que se constitue le noyau de l’Ics » (Freud, 1915/1988, p. 233). Selon Marty, il existe donc des fixations archaïques qui portent sur des fonctions psychosomatiques non relationnelles. Pour lui, ce ne sont pas seulement les événements vécus, mais aussi ce que le sujet apporte en naissant qui agit à travers des éléments qui proviennent de notre héritage archaïque, phylogénétique.
Ce faisant, le noyau inconscient primaire contient aussi, selon Marty, les traces mnésiques des fantasmes originaires qui nécessitent certains événements pour manifester leur présence et pour former avec ces événements de nouveaux systèmes de fixation-régression. Ceci consacre la présence d’une organisation inconsciente archaïque qui structure au cours de l’enfance les représentations (scène primitive, castration, séduction). Ce noyau inconscient primaire est morcelé au début de la vie et se constitue progressivement pour former un tout cohérent. Si l’héritage de l’individu est d’abord phylogénétique, celui-ci s’organise selon Marty en fonction de la « programmation », soit l’éveil du programme et sa mise en route et de « l’automation ». L’automation est le mode d’organisation d’un ensemble de procédés ou de systèmes qui visent à rendre automatiques une suite d’opérations. Il précise que les « Instincts de vie » sont très puissants et qu’ils vont s’épuiser au cours de l’évolution de l’individu, qu’il y a une tendance spontanée à l’organisation progressive chez le nourrisson et que la plupart du temps les fixations mises en place qui attirent les régressions ne deviennent sensibles qu’à l’adolescence. Ce sont les « Instincts de vie » pendant la croissance de l’enfant qui conduisent à la mise en place des [4]pare-excitations face aux différentes excitations. Pour Marty le réglage du pare-excitant est « infiniment nuancé ». « Il s’agit en réalité d’aider l’adaptation du nourrisson à une grande variété de faims, de soifs, de bruits, de froids et de chaleurs, en même temps que de le défendre souvent différemment contre ces diverses excitations » (ibid., p. 123).
Pour Marty, les « Instincts de mort » s’associent aux « Instincts de vie » afin de créer les points de fixations-régressions à différents niveaux fonctionnels vitaux. Nous observons avec Marty la progression de la construction du système fixation-régression de l’enfant dans les bras de sa mère. Il insiste sur la façon dont la mère apprécie affectivement les besoins et les désirs du petit enfant en fonction des signaux perçus « grâce à une identification profonde à celui-ci » (ibid., p. 125), identification demandée aussi au thérapeute et soulignée par Catherine Parat dans son travail sur « l’affect partagé ». Marty insiste aussi sur les modalités d’interventions et de non-interventions lors des interactions avec l’enfant, nous reconnaissons là aussi les conseils qu’il donne aux thérapeutes. Selon lui, les besoins et les désirs du nourrisson s’appuient successivement sur les « automations » et les « programmations » de l’évolution de l’enfant. La fonction maternelle comporte « trois clefs » (ibid., p. 125) : l’instinct maternel, les besoins et les désirs du nourrisson. L’instinct maternel résulte pour Marty des « traces mnésiques phylogénétiques et héréditaires essentiellement ». Les besoins et désirs du nourrisson se réfèrent aux programmations et automations des étages évolutifs. Ils provoquent l’éveil de l’instinct maternel qui ressent, perçoit les signaux de l’enfant. Dans l’idéal, la mère investit affectivement ni trop ni trop peu chacun des systèmes fonctionnels de l’enfant (respiratoire, alimentaire, excrétion, sommeil, etc.). C’est là que se constituent les fixations somatiques comme traces d’un niveau fonctionnel, elles engagent les plus primitifs éléments corporels et sensoriels, comme le propose Alain Fine (2001, p. 87). Ces traces précèdent dans leur mise en place les fixations mentales. Les niveaux psychosomatiques marqués par les fixations constituent des traces de vulnérabilité et de défense. Aussi, selon Marty « les fixations peuvent être à l’origine de manifestations pathologiques, elles constituent assurément, la plupart du temps, la base de particularités tant somatiques que psychiques chez des individus qui empruntent dans leur ensemble les voies les plus habituelles de la vie » (1976, p. 124).
Les systèmes de fixation-régression constituent les bases d’un narcissisme pensé comme étant psychosomatique dans son essence, ils en procurent la solidité qui permet au sujet d’éviter les désorganisations.
Avec Marty, il convient de prendre en compte l’influence déterminante qu’exerce l’héritage phylogénétique du sujet comme ses toutes premières interrelations avec l’environnement. Les systèmes de fixation se constituent en une chaîne successive dont les différents éléments interagissent et représentent, selon ses propres termes, une extension de la notion d’après-coup. Notons que si Marty différencie nettement les fixations et les régressions, elles sont intimement liées dans sa théorie. Il écrit : « Le retour des régressions aux points de fixation, combiné à l’inclusion de mécanismes de régression dans les phénomènes de fixation, nous invite personnellement à toujours avoir présente à l’esprit l’infinité évolutive, quel que soit le champ de notre intérêt immédiat » (ibid., p. 137). Les retours régressifs enrichissent les fixations. Les fixations racontent l’histoire de ce qui s’est déroulé à un moment, les régressions sont porteuses des enrichissements et des accidents lors de l’évolution, en particulier de la construction psychosomatique d’un sujet. Ainsi, si le nourrisson naît porteur de traces phylogénétiques et héréditaires, le point de vue évolutionniste de Marty donne un rôle essentiel à « la mère qui repère les signes du passage évolutif des manifestations répétitives (automation) vers la programmation évolutive […] la mère s’inscrit dans l’histoire de la maturation somatique, jouant un rôle (positif ou négatif) dans l’acquisition des fonctions somatiques » (Fain, 2001, p. 48). Diana Tabacof nous propose une nouvelle lecture des symptômes somatiques de Dora. Après celle de Freud et celle de Marty, partant des concepts de fixation somatique et de noyau traumatique, elle interroge la notion de « complaisance somatique » et ses destins, celle-ci pouvant devenir un symptôme symbolique dans la lignée conversionnelle (perle), ou bien, rester pure trace d’excitations non-symbolisées (grain de sable) propre à la lignée traumatique selon M. Fain et se manifestant par des symptômes somatiques.
C’est dans le même chapitre VII de L’interprétation du rêve que Freud revient après le « Projet de psychologie » (1900/2003), sur l’appareil de mémoire et sur la place de l’objet dans la construction des traces mnésiques que sont en particulier les représentations. Il sépare, cependant, son élaboration de la mémoire avec son feuilletage de traces, de son élaboration sur la place que tient l’objet dans l’engrammation des traces. Concernant l’objet, il reprend le récit du nourrisson affamé qui crie, gigote en état de détresse, faisant « l’expérience vécue de douleur » déjà abordée dans le « Projet ». La situation ne peut être modifiée qu’avec le moyen d’« une aide étrangère », objet « attentif à l’enfant » (p. 626). L’objet permet l’expérience vécue de satisfaction qui d’une part supprime l’excitation interne liée à l’apparition d’une certaine perception dont « l’image mnésique » est associée à « la trace mémorielle de l’excitation du besoin », et d’autre part produit l’image mnésique de la satisfaction. Ainsi se constitue « le matériel brut des traces mnésiques ». Dès que l’expérience du besoin survient à nouveau, une motion psychique, soit le désir, met la psyché à la recherche d’une identité de perception par la voie régrédiente interne. Ce processus débouche sur l’hallucination de la perception associée à la satisfaction. Mais ce n’est pas ainsi que la satisfaction est obtenue, l’infans néotène fait alors « l’amère expérience » de l’absence de l’objet. La douleur, écrit Freud, « arrache l’appareil psychique à la perception ». L’infans est contraint de rechercher une autre voie, celle du détour par le dehors, à faire « un examen de la réalité ». Cette voie, qu’accompagne la motricité : l’infans crie et pleure, l’oblige à penser, donc à se re-présenter l’objet satisfaisant. L’appareil psychique se résout à « représenter l’état des faits réels du monde extérieur et à tendre à la modification réelle » (Freud, 1911/1998, p. 14). Green en fait ainsi le commentaire : « […] le mouvement de cette demande corporelle, infigurable, venant investir une trace antérieure laissée par l’objet ayant apporté de la satisfaction constitue le temps inaugural de la pensée » (1988, p. 493). De son côté, Marilia Aisenstein souligne l’intimité entre le mouvement du désir et celui de la pensée, pensée qui ne se tient que dans la remémoration à partir de représentations allant jusqu’au matériel brut des traces qui en sont à la base (2021, p. 35-36).
En prolongeant notre lecture des textes freudiens, nous constatons qu’à la fin du « bloc magique » Freud écrit : « Si l’on s’imagine que pendant qu’une main écrit à la surface du bloc magique, une autre détache périodiquement de la feuille de couverture de la tablette de cire, on aurait là une façon de rendre sensible la manière dont j’ai voulu représenter le fonctionnement de notre appareil de perception animique » (1925/1992, p. 143). Dans le commentaire qu’il fait de ce texte, J. Derrida (1967, p. 334) souligne que les traces ne produisent l’espace de leur inscription qu’en se donnant la période de leur effacement. Dès l’origine, dans le « présent », les traces sont constituées par la double force de répétition et d’effacement. Mais, pour percevoir, ne faut-il pas deux mains, mais aussi deux sujets ? Le perçu ne se produit-il pas dans l’effacement du déjà perçu, sur fond de négativité, soit les traces de l’absence de l’objet ? Notons ce faisant que pour Freud la perception n’est pas première. L’infans doit d’abord attribuer à l’objet des connotations d’affects de plaisir et de déplaisir. Ce n’est que secondairement qu’il lui attribue une existence/non-existence. Soulignons aussi que l’investigation des patients dont les symptômes se déroulent sur la scène somatique conduit les psychosomaticiens de l’École psychosomatique de Paris à constater leur surinvestissement du perceptif. De plus, Smadja a bien montré l’absence du jugement d’existence chez ces patients.
28Avec Green, Christian Delourmel (2018), les psychosomaticiens de l’Ipso, le travail du négatif dans son aspect structurant et déstructurant est largement mis en avant. La question de la perception en lien avec son effacement est incluse dans l’espace du double retournement pulsionnel selon le double vertex structurant/déstructurant. Cela permet de penser la coexistence entre les possibilités d’enregistrement des traces perceptives nouvelles avec l’activité représentationnelle inconsciente, entre les représentances pulsionnelles (traces mnésiques inconscientes) et les représentations de mot (traces mnésiques conscientes), le fondement de l’activité psychique se situant dans la quête de l’objet dont l’existence se constitue du manque auquel il répond. Avec le concept d’hallucination négative de la mère, Green rend bien compte, du fait que l’infans est contraint à se représenter l’absence de sa mère pour la représenter. « L’hallucination négative de la mère a rendu les conditions de la représentation possible, la création d’une mémoire sans contenu […] » (1983, p. 127). Green souligne que lorsque l’objet s’efface, il devient structure encadrante du moi, précipité négatif, abritant l’hallucination négative. Celle-ci persistera lorsque la perception de la mère ne sera plus disponible du fait de son absence. Il ressort de ceci, d’une part, que l’hallucination négative fournit les limites d’un espace vide, vide jamais perçu par le sujet, mais qui permet les investissements sous forme de représentations et, d’autre part, que ce qui est emprunté à l’objet primaire est le sentiment d’une unité du moi qui vient du rôle d’appoint du pare-excitation fourni par la mère. Michel Fain précise que le double retournement « ne peut être que triangulaire ». C’est ainsi qu’il est refoulé, l’instance refoulante étant le surmoi maternel.
29Bernard Bensidoun prolonge ces avancées partant des traces des mains négatives laissées dans des grottes par les hommes du Magdalénien, mais aussi de « L’Homme invisible » d’Herbert George Wells et du cas de Sékou, un adolescent qui dessine en séance un personnage au crayon noir, puis l’efface. L’auteur comprend les mains non dessinées comme « traces témoignant de la manière dont un humain s’édifie, en se différenciant d’abord de son environnement sous la forme d’une représentation en négatif de soi ». Il poursuit en considérant que le contour de la main, « l’enveloppe » l’entourant, marque l’achèvement et l’acquisition de la différenciation, le processus en jeu étant le jugement d’existence décrit par Freud dans la « Négation ». La non-acquisition de la négation chez Sékou, faute d’un objet lui ayant procuré des expériences de satisfaction dans la passivité, entraîne la mise en place d’une défense négativante active par l’effacement.
30Pour finir, une question : quel est l’objet de la méthode analytique ? N’est-il pas, comme le propose Jean-Bertrand Pontalis, non pas la trace en elle-même, mais « le tracé, le passage qui ne suit jamais une ligne droite, mais bifurque, diverge. Parfois on se dérobe devant l’obstacle, on se fraye un chemin dans une autre direction ou l’on revient sur ses pas. Il nous arrive de rêver d’être des oiseaux migrateurs, d’envier leur vol à tire-d’aile. Comme elle nous semble lente parfois, la migration dans l’analyse » (1997, p. 101).
31La lecture de la Revue Le Présent de la psychanalyse sur « Traces » par Lorenzo Inghirami et Julie Moundic explore l’idée de « la trace » chez les auteurs ayant publié à ce sujet dans cette revue : Laurence Kahn, Jean-Michel Lévy, Jean-Michel Rey, Françoise Laurent, Alexandre Morel, Philippe Quéméré. Sur les traces de Pontalis, « au fil des traces », de traces en traces les deux lecteurs font apparaître de nouveaux tracés, de nouvelles découvertes, de nouvelles interrogations passionnantes. Ils écrivent : « Nous sommes proches de la méthode associative. Passant de la découverte d’un article à un autre, d’une première lecture à des lectures successives, la pensée du psychanalyste s’enrichit et se stratifie, tel le matériel qu’il est en train d’étudier. »
Au cœur du « Malaise dans la culture », Freud écrit : « Selon nous, aucun autre trait ne caractérise mieux la culture que l’estime de soin accordée aux activités psychiques supérieures, aux performances intellectuelles, scientifiques et artistiques, au rôle directeur concédé aux idées dans la vie des hommes » (1930/1994, p. 281). De même que, pour le petit de l’Homme, le « travail de culture » commence pour Freud bien avant de savoir lire et écrire, nous pouvons penser que le « travail culturel » des groupes humains débute avant l’écriture avec le langage plastique des dessins et des signes posés sur les parois des grottes du Paléolithique supérieur et du Néolithique. Le culturel apparaît pour Freud dès la préhistoire avec le meurtre collectif du père de la horde primitive suivi de sa dévoration, par l’union des fils, puis l’ambivalence affective empreinte de nostalgie envers ce père au point de le totémiser et d’instaurer des interdits fondamentaux. Ce travail de deuil collectif est comparable à celui des objets œdipiens pour un individu. Si les travaux anthropologiques et philologiques sur lesquels Freud a travaillé ont été démentis, Gilbert Diatkine reprend dans son article l’idée que l’hypothèse fondamentale de Freud sur la civilisation reste vérifiée, chaque progrès de celle-ci reposant sur un travail de deuil collectif. Le culturel est bien contemporain des traces et marques qui transmettent les affects. Les traces de leur perception se répliquent, dès avant la naissance de l’écriture, et donc de l’Histoire, par une projection peinte et grattée sur la paroi d’une grotte, premier miroir de la psyché dont l’aplat graniteux est la première page. Comme déjà signalé, à la suite de Green, Bensidoun propose une interprétation des traces des mains négatives laissées dans des grottes préhistoriques. Traces que tentent aussi de déchiffrer de nombreux préhistoriens et inspirent même Marguerite Duras qui a réalisé un court métrage intitulé Les Mains négatives, l’ouverture du film faisant place à un bel avant-texte à ce sujet. C’est pourquoi nous ouvrons la partie de cette revue qui concerne « Traces et culture » par la reproduction d’un dessin de mains négatives ornant la grotte préhistorique de Pech Merle qui se situe en Occitanie.
À la fin de « Malaise dans la culture », Freud nous rappelle cependant que la destructivité de l’homme est inguérissable. Le livre de Michel Granek, Une grande voyage en est une très forte et émouvante illustration. L’auteur nous a conduits, Gérard Pirlot et moi-même, sur les traces de la Shoah et le manque de traces, « blancs », « béances inéluctables » liées au meurtre par les nazis de son grand-père, et aussi au sentiment douloureux de ne pas avoir, peut-être, assez interrogé ses parents. Travail de transmission des traumatismes à travers les identifications de l’auteur aux traumatismes qu’ont pu vivre et penser ses grand-père et père, sa mère. Identifications aux sensations et affects d’effroi que la forme du récit impose au lecteur, partage aussi des souvenirs de sa famille : ses grands-parents et leur fils, son père, souriant quelque peu derrière un piano et présents dès la couverture. « Impératif d’inscription », selon Bernard Chervet, articulant un mouvement régrédient vers des affects à faire survivre et un mouvement progrédient vers une belle écriture et des souvenirs plus doux. Récit d’un grand-père dédicacé à sa petite-fille et d’un fils endeuillé à plusieurs titres. « Grande voyage » au milieu du système criminel qui s’est employé méthodiquement à effacer les traces de tout un peuple et celles de sa destruction. Récit aussi historique de résistance, résistance comme celle de son père actif au sein de l’Armée juive. Devoir de mémoire.
Le sociologue et anthropologue David Le Breton, spécialiste de la sociologie du corps, de ses représentations et de ses mises en jeu, nous invite à penser la profondeur des cicatrices. L’auteur décrit la façon dont elles dessinent la géographie du corps, dont elles racontent des fragments d’une histoire à même la chair avec leur propre langage contribuant à l’individualisation du sujet. Ainsi d’une marque à l’autre une biographie se trame. Les cicatrices peuvent être négativantes, envahissant le sujet et devenant le centre de son existence.
Nous avons tenu aussi à rendre hommage à Philippe Sollers en l’inscrivant dans le feuilletage mémoriel de notre Revue. Julia Kristeva, très généreusement, nous a aidés à trouver le beau texte « Le corps » et autorisés à le « reproduire ». Il a été publié dans Éloge de l’infini, « L’Infini » qui était le titre de la revue et de la collection que Sollers a créées et dirigées chez Gallimard. Sollers, qui conseillait à ses lecteurs d’être comme les démons qui ne laissent pas de traces, d’être comme de l’eau que rien ne blesse, laisse les traces précieuses, inclassables, d’une œuvre majeure, celle d’un homme épris d’infini.
Suivent deux poèmes inspirés par les traces du psychanalyste Gérard Pirlot et deux haïkus choisis par Jacques Miedzyrzecki.
Trois travaux de recherche permettent d’ouvrir notre réflexion sur la question des traces et de clore ce numéro de la Revue :
Laurent Chiche, en s’appuyant sur les données d’investigation de patients qui souffrent de somatoses sévères auto-immunes ou cancéreuses et les données de la biologie moderne ainsi que sur la littérature psychanalytique entre autres celle de la psychosomatique de l’École de Paris, avance que la somatisation peut être considérée comme « un fétiche somatique ». Il pose que le fétiche somatique condense à la fois des traces traumatiques et une création défensive pour s’en défendre. L’analyse des caractéristiques du fétiche permet un accès rétrospectif à certains déterminants de la somatisation.
La réflexion croisée de Guillemine Chaudoye et de Rafika Zebdi ouvre sur la question des traces à l’interface de la psychanalyse et des neurosciences et ce qu’elles permettent en termes de plasticité, tant psychique que neuronale. En même temps que Freud propose un projet pour une psychologie scientifique, le champ des neurosciences fait jour et ouvre à de nouvelles perspectives de pensées et de connaissances. Les traces, preuves de l’expérience acquise, vont permettre de penser un travail de mémoire, tant dans sa dimension psychique que neurologique. Mais à ces plasticités psychiques et cérébrales se joint une nouvelle : celle des neurones artificiels, toile de fond d’un champ de recherche et d’ouverture dont on ne connaît pas encore l’envergure : l’intelligence artificielle, elle aussi sujette à expérience, elle aussi empreinte de traces, laissant présager de sa propre plasticité.
Nous refermons cette Revue avec Mathilde Saïet qui nous a proposé un article interrogeant la « situation d’impasse » dans laquelle sont parfois placés les sujets « en attente » (« sans-papiers », « migrants », « demandeurs d’asile », etc.) et les conséquences d’une telle attente sur les processus psychiques et, en particulier, sur l’organisation de la temporalité. Les conceptualisations du temps chez Freud conduisent l’auteure à saisir ce qui peut apparaître comme une « figure du temps éclaté », tel qu’il a été proposé par André Green. L’auteure nourrit sa réflexion avec la pièce de théâtre En attendant Godot, de Samuel Beckett.
Avant-propos (lire en PDF)
Dominique Cupa
Le modèle de la traduction dans le processus de l’après-coup
Claude Smadja
Les traces inconscientes des traumatismes vécus par les générations précédentes sont-elles des traces mnésiques phylogénétiques ?
Gilbert Diatkine
Retour sur Dora, le grain de sable et la perle : de la trace somatique à la conversion
Diana Tabacof
Le travail de réunification des traces
Psychothérapie analytique d’une adolescente présentant des somatisations
Nathalie Thessier
« Entre effacement et négation : Ne pas être pour être »
Bernard Bensidoun
Lecture de : Le présent de la psychanalyse 9, janvier 2023 : « La trace »
Lorenzo Inghirami, Julie Moundlic
Traces dans la culture
Les mains négatives
Lecture de : Une grande voyage, de Michel Granek
Dominique Cupa, Gérard Pirlot
Les cicatrices ou une vie dans la peau
David Le Breton
Hommage à Philippe Sollers
Philippe Sollers, Le Corps (extraits)
Philippe Sollers, Propos recueillis par Sophie Rostain, E. Picault, et al.
Haïkus
Poèmes
Gérard Pirlot
Recherches
Fétiche somatique, le plus commun destin des traces ?
Laurent Chiche
Traces et plasticités en psychanalyse, neurosciences et dans l’Intelligence Artificielle
Guillemine Chaudoye, Rafika Zebdi
Le temps perdu de l’attente
Mathilde Saïet
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